Le préhistorien vendéen Roger Joussaume, spécialiste mondial bien connu du mégalithisme, vient, en cette fin du mois de mai 2010, de publier un compte rendu du volume 2 de la monographie relative au Champ mégalithique de Wéris
. Fouilles de 1979 à 2001. Volume 2 : Rapports de fouilles, Etudes et Documents, Archéologie, 15, éd. Ministère de la Région wallonne, Namur, 320 p, réalisé sous la direction de M. Toussaint, C. Frébutte & F. Hubert.
Ce compte rendu, dont le texte est proposé ci-dessous, provient du n° 2, avril-juin 2010, du Bulletin de la Société préhistorique française, p. 392 et 393.
Il s’agit de la monographie des fouilles effectuées entre 1979 et 2001 sur le champ mégalithique de Wéris
en Belgique qui jusqu’alors n’avaient été que partiellement publiées, voire pratiquement pas pour certaines d’entre elles, à part quelques notes disparates. Les trois directeurs scientifiques cités ont été assistés par Stéphane Pirson, Françoise Hubert-Moyson et Philippe Masy. Cette monographie présente les études, réflexions, questions et réponses liées aux fouilles de divers monuments mégalithiques d’un secteur géographique long de 8 km pour seulement 300 m de large, contenant un véritable alignement de monuments mégalithiques dans lequel se trouvent en particulier les deux célèbres allées couvertes de Wéris.
Alors que le premier volume de près de 500 pages, paru en 2003 sous la direction de Michel Toussaint, présentait l’historique des travaux effectués sur certains des différents monuments avant les fouilles modemes dans leurs contextes archéologique et géologique, et avant la parution d’un troisième tome qui fera la synthèse des deux premiers, les auteurs s’attachent ici à détailler de manière très précise et parfaitement illustrée ces fouilles récentes des menhirs d'Ozo, de Heyd, de Morville, du Champ Paquet, de Wéris I et ll et d’Oppagne ainsi que des allées couvertes de Wéris I et II, chacun formant un chapitre de l’ouvrage dont on soulignera la qualité et la clarté de la publication.
Je dois dire que je déplore, mais cela n’engage que moi, l’utilisation d'une terminologie fondée sur des faits
comme le menhir de Heyd, bloc de pierre qui est une unité stratigraphique
, ou une fosse du menhir d’Ozo, formée d’US négative ou positive selon qu’il s’agit du contenant ou du contenu alors qu’il serait si simple et beaucoup plus signifiant de parler de fosse et de son remplissage qui, lui, peut être formé d'unités stratigraphiques. On pourrait faire en sorte qu’une terminologie de terrain, terminologie d’attente, utilise un vocabulaire plus expressif pour un lecteur non spécialisé (comme pour les autres d`ailleurs !).
Si la clavicule d’un enfant mort-né ou juste né, située dans la fosse de calage du menhir de Heyd, est très importante pour la datation qu’elle foumit, entre 3300 et 2900 av. J.-C., soit au Néolithique récent régional, elle pose plus de problèmes pour attribuer un caractère funéraire à ce menhir. Ce fait soulève toutefois des interrogations bien intéressantes en rapport avec le rôle des pierres dressées.
Au sujet des allées couvertes de Wéris I et II, dont on a désormais des descriptions précises des travaux qui y ont été effectués, les datations montrent, par les ossements recueillis et par les pointes de flèches à ailerons et pédoncule, qu’elles furent utilisées dans le premier quart du IIIe millénaire av. J.-C., soit au début du Néolithique final qui est peut-être également la date de leur édification. Dans l’absolu, quel que soit le dépôt archéologique le plus ancien mis en évidence dans une chambre funéraire plus ou moins mégalithique, on ne peut affirmer qu’il date la construction du monument. Considérer par exemple que ces chambres les plus anciennes ont été bâties pour une élite
, comme il est assez courant de le lire actuellement, est pour le moins un abus d’interprétation qui sert uniquement un modèle interprétatif qui ne s’appuie sur aucune preuve réelle. Toutefois, l’idée que les allées couvertes de Wéris aient été construites au Néolithique final par un peuple situé chronologiquement en parallèle au groupe de Gord, et à l’Artenacien plus au sud, est tout à fait soutenable actuellement. On notera cependant le faible nombre de sujets reconnus qui conduit à un questionnement poussé de la part des auteurs qui ont bien raison de prendre la peine de rappeler les définitions relatives aux sépultures collectives
ou plurielles
, termes dont la différence ne saute pas à l’esprit de tout un chacun.
Nul ne doute que j’aurais aimé pouvoir parler davantage de ce très bon travail, mais je dois m’arrêter. J’engage donc tout ceux qui s’intéressent au mégalithisme et aux coutumes funéraires à lire ce livre en attendant le prochain qui devrait être passionnant par la synthèse et les comparaisons qu’il doit établir et discuter.